Question écrite

La stratégie pénitentiaire du canton du Jura fait parler d’elle depuis quelques semaines. L’utilisation de la prison de Moutier une fois la ville devenue jurassienne a fait l’objet d’une interpellation au mois
de mars. Plus récemment, c’est le rapport de la Commission nationale de prévention de la torture (CNPT) dénonçant les conditions de détention à la prison de Porrentruy qui a fait l’objet de deux
questions orales lors de la session parlementaire du mois de mai. Ces interventions ont permis au Gouvernement jurassien de rappeler l’état de la situation : les sites de Porrentruy et Delémont disposent de 32 places de détention, mais la CNPT recommande leur fermeture. Le canton du Jura comptait en 2023 une moyenne de 70 détenus, dont un nombre important était dès lors placé hors canton.

La stratégie pour le futur prévoit l’intégration de la prison de Moutier (25 places) au dispositif carcéral jurassien dès 2026 et la construction d’une nouvelle prison à l’horizon 2030 – 2035.
Au vu des coûts exorbitants d’une telle infrastructure, ils se chiffreront en dizaines de millions (1million de franc la cellule), la sagesse recommande d’analyser la situation en détail et notamment d’explorer les alternatives à la détention. Daniel Fink, ancien chef de la section Criminalité et droit pénal à l’Office fédéral de la statistique, relève que « les cantons romands ont, de manière proportionnelle, davantage recours à la prison que les autres cantons » (Daniel Fink, La prison en Suisse).La même différence culturelle est observée par André Kuhn, professeur de criminologie à l’université de Neuchâtel : « bien que les lois soient les mêmes, nos juges [les juges des cantons latins] procèdent plus souvent à des détentions provisoires et prononcent plus souvent des privations de liberté que les juges alémaniques. » (Le Courrier, 31.05.2024)
Il convient dès lors, selon Daniel Fink, de réorienter le débat sur les alternatives à la détention plutôt que sur la création de nouvelles prisons : « Plutôt que de construire des prisons onéreuses, plutôt que de parler du besoin de place supplémentaires de détention, il vaudrait mieux songer aux alternatives à la détention, qui sont toutes aussi efficaces – à long terme probablement plus efficaces– et certainement moins coûteuses pour la collectivité que la privation de liberté ».

Au vu de ce qui précède, nous souhaitons poser au Gouvernement les questions suivantes :

  • 1. Où se situe le Jura en comparaison avec les autres cantons suisses, et notamment avec les cantons de Suisse alémanique, en termes d’usage de la détention provisoire et de la privation de liberté ?
  • 2. Comment le Gouvernement explique-t-il les différences observées avec les autres cantons ?
  • 3. Une analyse en termes d’alternatives à la détention a-t-elle été réalisée en parallèle à l’étude menée en vue de construire une nouvelle prison ?
  • 4. Si oui, quelles alternatives sont envisagées?
  • 5. Si non, est-il prévu d’en mener une ?

Nous remercions par avance le Gouvernement pour ses réponses.

Delémont, le 17 juin 2024 – Groupe Vert·es et CS-POP 

Responsable : Ivan Godat

Godat Ivan

Député